Voici les notes bibliographiques de Teresa Keorb. Il y a des références, des résumés sur des auteurs philosophiques et théologiques, et sur quelques-unes de leurs oeuvres.
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Saint Anselme, Le Proslogion, I-IV, Vrin, traduction A. Koyné.
(Extrait tiré du texte trouvé sur
http://mecaniqueuniverselle.net/textes-philosophiques/saint-anselme.php
Chapitre I : « Je ne cherche pas à comprendre afin de croire, je crois afin de comprendre; je ne puis avoir l'intelligence qu'à condition d'avoir d'abord la foi. »
François Barriquand est prêtre du diocèse de Créteil, polytechnicien (X 1985), et ancien de Ginette (1983-1985). Il est docteur en physque et docteur en théologie.
La liberté humaine réside-t-elle vraiment dans le fait que nous ignorons les causes qui nous déterminent ? Parmi les philosophes qui, contre vents et marées, refusent de souscrire à une conception aussi pessimiste de la liberté, certains s'efforcent de promouvoir l'hypothèse selon laquelle il existe des phénomènes émergents, dont les causes ne relèveraient pas des seules lois physiques permettant de modéliser les phénomènes naturels les plus élémentaires. Le point de vue défendu dans le présent ouvrage ne dépend pas de la validité d'une telle hypothèse. Il s'appuie principalement sur le constat selon lequel les conditions nécessaires à l'existence des lois de la nature échappent nécessairement, du fait de leur circularité, à toute tentative de saisie objective. Il pourrait donc en aller de même en ce qui concerne la liberté humaine elle-même, dont l'existence gagne ainsi quelque crédibilité, ne serait-ce qu'à titre d'hypothèse. Mais d'où vient notre liberté, si tant est qu'elle puisse exister ? A quelle source puise-t-elle sa force ? La foi chrétienne indique, par les mots de l'apôtre Paul, que là où est l'Esprit, là est la liberté (2 Cor 3, 17). Le présent essai se présente, en définitive, comme une sorte d'écho rendu à une telle affirmation.
NB : Le ch 9 ("Le Peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière...") célèbre l'intronisation du jeune roi Ézékias en 716, au moment où la menace Assyrienne s'appesantit sur le royaume de Juda. Soutenu par le prophète Isaïe, le nouveau "messie" (oint) procédera à une réforme religieuse et résistera à l'Assyrien (en 701, Jérusalem assiégée est sauvée de justesse). La titulature est impressionnante, elle rappelle celle des pharaons égyptiens : Dieu-Fort, Père-à-jamais. À tel point que la traduction grecque de la Septante renoncera et remplacera par "Ange du grand conseil" ! Car nul homme en monde juif ne saurait être appelé "Dieu". Mais les Pères de l'Église, qui connaissaient les titres de l'hébreu et les appliquaient déjà à Jésus, se sont étonnés de ce qu'ils considéraient comme un "recul" ! Roselyne Dupont-Roc, bibliste, dans Prions En Eglise Août 2022
Crise de 701À Göttingen, Édith Stein retrouvait un de ses cousins : Richard Courant, déjà enseignant. Tous deux ont été stimulés par l'esprit de créativité intellectuelle qui régnait à Göttingen. Göttingen était un village où se côtoyaient mathématiciens, physiciens et philosophes. L'ambiance y était familiale : les étudiants étaient invités dans les familles des professeurs et se connaissaient tous entre eux. Les grandes découvertes conceptuelles de la physique soulevaient alors des questions philosophiques et défiaient directement le savoir-faire des mathématiciens. La synergie de l'innovation y était particulièrement féconde et elle était favorisée par le fait que les étudiants devaient étudier au moins trois matières principales. Richard Courant avait choisi les mathématiques, la physique et la philosophie... qu'il avait étudiée avec Husserl. La physique classique jusqu'alors reine se retrouvait limitée à un petit domaine de conditions de validité, qui heureusement incluait notre échelle humaine d'expériences quotidiennes mais excluait de vastes champs du réel, aux grandes échelles cosmiques comme aux petites échelles atomiques. Einstein affirmait la limite absolue de la vitesse de la lumière dans le vide avant de formuler que les coordonnées d'espace et de temps formaient une structure mathématique déformable par la matière. À Göttingen, le professeur Minkowski, mathématicien, donnait une formulation géométrique de la relativité restreinte d'Einstein en introduisant l'espace-temps. Einstein élargit aussi la théorie des quanta présentée par Max Planck. La physique quantique, dont l'interprétation philosophique était (et demeure) plus controversée, semblait indiquer que notre capacité d'observation du réel était intrinsèquement limitée et que la structure même du réel semblait irréductiblement décrite par des lois probabilistes. Et Göttingen allait bientôt devenir un des centres de cette nouvelle physique quantique avec, entre autres, Max Born, qui y fut étudiant puis professeur.
Chacune de ses conceptions nouvelles appelait à reprendre à nouveaux frais le débat entre réalistes et idéalistes : l'observateur humain pouvait-il espérer pénétrer le réel en lui-même et découvrir ses lois intrinsèques ou ne pouvait-il que prédire, grâce à des lois imparfaites issues de son cerveau, des phénomènes physiques qui lui resteraient définitivement opaques ? Philosophes et physiciens en débattaient. Quant aux mathématiciens, ils étaient impliqués directement par la formulation de ces nouvelles physiques, par la résolution des équations complexes qui en découlaient, une résolution qui allait favoriser l'invention de l'informatique.
Göttingen se caractérisait donc par la fécondation mutuelle des divers champs de recherche, la collaboration entre les différents chercheurs et l'étroite connexion entre théorie et applications pratiques. C'est à cette effervescence intellectuelle que participèrent Édith Stein comme phénoménologue et Richard Courant comme mathématicien formé à la phénoménologie.
Édith Stein dépeint longuement la personnalité de son cousin Richard, personnage haut en couleurs, et un des cousins els plus proches d'Édith. Adolescent, il venait une fois par semaine chez sa tante Augusta. Il amusait alors tout le monde par son humour, son art de raconter plaisamment les histoires et de présenter tout sur un mode burlesque. Richard commença en 1905 à étudier les mathematiques à l'université de Breslau. Édith raconte comment il essaya de la convaincre de prendre la même spécialisation. Il l'aide à rattraper le niveau de mathématiques pour pouvoir continuer ses études après son arrêt momentané de l'école et son séjour à Hambourg, en 1906. Richard devient le répétiteur de sa cousine : « Je n'avais eu que peu de leçons avec lui ; je n'avais appris à l'apprécier à sa juste valeur que lors de ces quelques cours. Il alla ensuite à Göttingen sur le conseil de ses amis, car c'était d'une importance décisive pour sa carrière future. » Édith n'était pas insensible au plaisir de résoudre un problème mathématique. Elle le raconte elle-même : « Apres chaque problème de mathématiques résolu, je sifflai quelques notes en hymne de triomphe. Je n'envisageai jamais de me spécialiser en mathématiques. J'y trouvais un plaisir sportif comme à une saine gymnastique intellectuelle mais ce n'était pas ce pour quoi je me sentais faite '. » En fait, elle n'a pas pu faire l'expérience de ce qu'est la recherche en mathématiques, où il ne s'agit pas, comme à l'école, de chercher une solution à un problème qui en a certainement une dans le corrigé d'exercices, mais où il s'agit d'identifier un problème qui ait une solution, ou dont on puisse prouver qu'il n'en a pas. C'est aussi Richard qui comprend son attirance pour la philosophie ou du moins la soutient dans son choix étonnant :
« Comment as-tu donc eu l'idée d'étudier la philosophie? me demanda-t-1l. — Et toi, comment as-tu eu l'idée d'étudier les mathématiques ? lui répondai-je en souriant. Il comprit bien ce que je voulais dire, cependant il ne se déclara pas satisfait. — Mais en as-tu déjà fait ? - Non, pas encore vraiment. Pourtant c'est ce que je veux. J'ai bien déjà lu un peu de Haeckel. Mais cela ne mérite certes pas le nom de philosophie.
Peut-être est-ce ce jugement qui suscita sa confiance en mes capacités philosophiques. Il ne posa pas davantage de questions. »
Ce dialogue révèle bien la personnalité d'Édith : décision, reconnaissance de ce qu'elle ne sait pas, et reconnaissance aussi de ce. qu'elle sait. Richard avait dû braver en son temps le scepticisme familial face à sa « vocation » dé mathématicien, il est donc implicitement du côté d'Édith. Ce sont deux êtres éminemment libres, qui ont toujours décidé par rapport à leur volonté profonde. Les deux cousins se ressemblent aussi par leur goût de la pédagogie : dès quatorze ans, Richard a donné des cours pour gagner de l'argent de poche certes, mais aussi par plaisir d'enseigner et il restera toujours enseignant.
Richard n'était pas seulement un as en mathématiques mais aussi en musique. Il apprit tout seul le piano et put participer à des concerts. Après l'échec de son mariage avec une mathématicienne, Nelly Neumann, il épousa en janvier 1919 une musicienne, Nerina Runge, fille, du reste, d'un célèbre mathématicien de Göttingen. Édith Stein, qui connaît et apprécie Nelly, s'étend longuement sur cette période où elle a aidé son cousin, en pleine Première Guerre mondiale. Édith l'écoute et lui dit ce qu'elle pense être la vérité, allant même jusqu'à le traiter de « gamin immature ». « Il s'établit entre nous à partir de ce moment une relation de confiance qui ne se démentit jamais '» ! Ainsi peut-on esquisser les relations entre les deux cousins.
Quelle fut la formation mathématique de Courant puis sa contribution en ce domaine ? En 1907, Richard part pour Göttingen, où il étudie avec les professeurs Minkowski et Hilbert. Courant devint l'assistant de Hilbert en 1908, passa sa thèse en 1910, son habilitation en 1912. David Hilbert était déjà un des très grands mathématiciens européens, voire le plus grand après la mort de Poincaré en 1912. Devenu le chef de file des mathématiques nouvelles élaborées en synergie avec les nouvelles physiques, Hilbert avait présenté dès avril 1900 une liste de vingt-trois problèmes en invitant les mathématiciens du monde entier à les résoudre, liste qui est restée jusqu'à nos jours une sorte de programme pour la recherche en mathématiques. Dans les années où Édith arrive à Göttingen, Hilbert se tourne résolument vers la physique et y entraîne Courant. Les développements en physique nécessitaient de résoudre des équations compliquées. Rien d'étonnant non plus, vu les gros calculs à effectuer, à ce que l'on cherchât à développer les mathématiques appliquées. Mais à l'époque, quoique ce soit très difficile à imaginer pour nous, il n'y avait pas encore d'ordinateur ! Il restait à l'inventer. Ce fut justement ce qui mobilisa l'énergie èt la créativité de Richard Courant. Avec succès.
En 1922, il fonde l'Institut de mathématiques de l'université de Göttingen. Deux ans plus tard, il publie avec Hilbert le premier tome d'un livre très célèbre : Méthode de la physique mathématique (1924). Après 1933, chassé comme juif de l'université, contraint de quitter l'Allemagne, Courant repart de en Angleterre puis aux Etats-Unis. Il fonde le centre d recherche de mathématiques appliquées de New York. Les débuts ne furent pas faciles et ses amis américains dirent qu'il ne s'adapta jamais vraiment aux Etats-Unis, il cherchait à y faire revivre l'esprit de Göttingen. Sa plus grande contribution en mathématiques fut sans doute « la méthode des élément finis ». Les équations différentielles ne rencontrent des solutions analytiques explicites que dans des cas très simples ; pou des situations complexes - c'est-à-dire toutes les situations réelles ! -, il faut en venir à des approximations numériques. La méthode des éléments finis consiste à décomposer le gros problème en petits problèmes pour chaque zone du système (élément). Évidemment, cela donne beaucoup d'équations simples à poser et beaucoup d'inconnues à calculer, c'est pourquoi il faut des ordinateurs pour en venir à bout... Cette méthode est aujourd'hui devenue un outil indispensable, utilisé dans les phases de développement, de construction et de recherche dans tous les secteurs industriels. La méthode correspond au caractère de Courant, selon un de ses derniers étudiants, qui l'aidait à écrire peu avant sa mort le troisième tome* du fameux livre Courant-Hilbert : « Les difficultés techniques [...] ne l'effrayaient jamais ; il faisait sentir à l'autre que toute tâche mathématique peut être résolue quand elle est basée sur une idée saine et convaincante. Après avoir discuté avec lui d'un problème, je sortais très confiant dans le fait que, à la fin, la solution serait accessible !. » Je crois qu'il y a aussi de cet art de la confiance et de la simplicité dans l'optimisme des phénoménologues et dans l'attitude intellectuelle de sa cousine Édith !
L'Institut Courant à New York reste un haut lieu des mathématiques contemporaines. En 2002, sa démonstration en poche, un jeune mathématicien russe, qui avait passé deux ans au début de sa carrière à l'Institut Courant, a affirmé qu'il avait démontré l'un des énoncés les plus célèbres de l'histoire récente des mathématiques, la « conjecture de Poincaré », un des problèmes irréductibles de la liste de Hilbert. En avril 2003, Grisha Perelman a en effet donné une conférence à l'Institut Courant avant de retourner en Russie et de laisser ses collègues internationaux « plancher » pour comprendre sa démonstration et confirmer sa validité... ce qui leur prit trois ans ! Preuve s'il en est de la vitalité de l'« héritage » de Richard Courant !
Richard et sa cousine Édith représentent ainsi chacun à sa manière la fécondité intellectuelle de Göttingen et de l'interdisciplinarité qui y régnait. Mais la vie de Richard Courant nous livre aussi un autre enseignement, que nous retrouverons comme une des idées forces de la pensée d'Édith Stein : l'enrichissement à découvrir chez d'autres des valeurs que l'on n'a pas (encore) expérimentées soi-même. L'intuition mathématique est un exemple qui témoigne de la richesse et de la diversité de nos perceptions du réel. Il y a une perception des réalités mathématiques, un « autre sens » plus élaboré que nos sens physiques. Même sans être soi-même doué en mathématiques, même sans expérimenter soi-même cette « valeur », on peut deviner que d'autres y ont des aptitudes et en éprouvent, après une rude ascèse, des joies inconnues au commun des mortels. Richard Courant a eu ce mot savoureux : « Ce n'est pas que je haïsse la logique mais elle ne m'attire pas, je crois en l'intuition ! » Cela peut fournir un argument pour établir le fait que certaines personnes ont un « sens » supplémentaire pour percevoir et jouir de réalités immatérielles, mathématiques en l'occurrence, ce que peuvent admettre même des esprit allergiques aux mathématiques. Suivant un raisonnement par analogie, des esprits sans expérience spirituelle peuvent ainsi accepter, à titre d'hypothèse, qu'il y a aussi un autre sens qui permet de saisir des réalités spirituelles.
L'intuition mathématique de Richard Courant, l'intuition spirituelle d'Édith Stein, quoique de genres très différents, présentent du reste une analogie de méthode : une aptitude à ramener à la simplicité des problèmes complexes (est-ce que cela serait en lien avec leur sens de l'humour à tous les deux ?), et surtout une sensibilité particulière à une réalité à laquelle la plupart des gens restent imperméables : pour Richard les réalités mathématiques, pour Édith les concepts philosophiques puis l'expérience spirituelle. Nerina Courant, épouse de Richard, a vu juste : « Richard et Édith étaient vraiment amis; ils s'aimaient beaucoup. Je ne peux manquer de comparer ces deux cousins. Bien sûr, ils appartiennent à deux mondes totalement différents - le monde religieux catholique et le monde scientifique des mathématiciens; et pourtant, ils ont bien des choses en commun ; non seulement ils sont devenus tous deux célèbres dans ces deux domaines si différents, mais ils possédaient également tous les deux une intelligence hors du commun, une énergie et une capacité de travail inépuisables, une grande bonté et une manière désintéressée de s'abandonner à quelque chose que je sens être l'Esprit-Saint. »
Journaliste scientifique aguerri, Michel Rochon propose une exploration fascinante du cerveau musical. Séparé en douze chapitres, cet essai de vulgarisation scientifique offre un voyage ambitieux allant du Big Bang à l'intelligence artificielle. Il révèle les plus récentes découvertes en neuropsychologie, en linguistique et même en mathématiques qui nous font comprendre autrement les harmonies sonores.
Malgré la complexité des notions abordées, ce livre s'adresse à tous par son écriture fluide et accessible. Une rencontre passionnante entre l'art et la science.
Baruch Spinoza (1632-1677)
Né d'une famille juive aux Pyas-Bas
Spinoza y décrit sa conception de la liberté humaine, avec ce concept qu'il a souvent écrit et répété :
Nous pensons être libres, mais nous sommes en fait agis par des motifs invisibles. Illusion suprême, la liberté n'est que « l'ignorance des causes qui nous déterminent » (Lettre à Schueller).